Quartiers d'agouni fourou - AGNI MLIDI

ZOOM et historique

L. LALIAM, AGNI MLIDI


Que l’on remonte des champs environnants ou de Larva n’ath wassif, l’arrivée à Agouni Mellidi constitue toujours une étape de soulagement et d’apaisement dès lors que le pied du marcheur haleté par les montées abruptes de nos reliefs, est posé sur l’asphalte de la route qui borde ce quartier. Évoquer Agouni Mellidi, sans évoquer Agarage n’Vouchachiw ou l’épicerie d’Ahmedh Kaloun, constitue un crime de lèse majesté. Cela est d’autant vrai que le premier personnage cité, a su imprégner un toponyme bis à ce quartier qui jusque là était connu sous l’appellation « Agouni Mellidi) en référence, je suppose, à une plante qui y poussait ( ?). Mohamed Kerfas connu sous le nom de vouchachiw était le premier à construire un garage (le premier du village) pour y abriter son camion de marque Hotchkiss que conduisait son fils Achour. Depuis, Agarage s’invite aisément et sans prêter à confusion dans le vocabulaire des agouni fourien pour désigner ce lieu.
Quant au second personnage, il en était le gardien du temple à telle enseigne que son nom est phagocyté par le nom du lieu : « Ahmedh ougarage ». Qu’il ventait ou qu’il neigeait, d’Ahmedh Kaloun était toujours derrière le comptoir à vous accueillir et servir avec amabilité. Son épicerie était le lieu de rendez vous des jeunes adolescents rongés par l’ennui, ou de ceux qui revenaient de l’exile, racontant leurs aventures et qui souvent finissent par céder à D’Ahmedh une pièce de monnaie argentée ou dorée, ou une carte postale de Maubeuge ou de Paris, qui sont toutes soigneusement rangées telles des reliques, sous l’épais verre recouvrant le comptoir. Toute cette mosaïque vous incitera à voyager.
D’Ahmedh est aussi le dépositaire de l’histoire du village. De sa voix de stentor, il ne se lasse pas de vous narrer des histoires immémoriales du village, racontées par les vieux qui trouvaient refuge dans sa boutique quand s’adonnaient à d’interminable partie de foot sur l’asphalte de la route, de jeunes potaches qui sous d’autre cieux auraient fait une bonne carrière footballistique.




Au départ, il n’y avait aucune construction à Agouni Mellidi. Les villageois, bien que pris dans l’étroitesse des quartiers de Thadarth, rechignaient à construire au delas du cimetière Thahemamth, gardien et protecteur contre les démons qui n’osaient le franchir. Pourtant une première maison fut construite bien avant la révolution, par la famille Kerriche, mais non habitée. D’ailleurs elle servait de « cabinet médicale » pour le médecin de la colonisation qui y venait de temps à autres prodiguer des soins.
Ce n’est qu’à l’indépendance que l’exode fut massif. La famille Hellal a construit une maison. Puis vint le tour des khemar et Kerriche, et par la suite les Khelfan, Mechoub, Kerbane et Idir. Quant à la famille hemmar et Hechiche, elles ont osé s’aventurer jusqu’à Asyakh pour y implanter leurs maisons vers l’année 1979, suivis par les Kermad. Il y a lieu aussi de signaler qu’avant l’ouverture en 1974 de la piste reliant Akham El Kaidh à vouchiker, Agouni Mellidi fut l’arrêt et le terminus incontournables des populations des Ath Wadhela, vouchiker et Ath Yekhlef. Depuis le quartier ne cesse de s’agrandir, s’étirant dans tous les sens et accueillant même des citadins en quête de tranquillité après l’arrivée du gaz naturel.
Quant à moi l’évocation d’Agouni Mellidi, est toujours imprégné de la saveur d’une crème glacée au gout du cassis. La première glace que j’ai mangée chez D’Ahmedh et qui en restera la meilleure.
Larbi LALIAM,  scénariste , réalisateur et producteur audiovisuel.