Sur le chemin des souvenirs
Fête de l'aîd au village
L. Mahroug, LAYD Di TADDART
Souvent je reste perdue dans mes pensées, je pleure et la nostalgie m'envahit. Je revois à travers ces souvenirs les années oubliées de notre jeunesse.
Je pleure le passé et les bons moments partagés. Les bleus dans l'âme, les souvenirs dans l'ombre ineffaçables.
Face à la vie qui nous charge, je m'acharne à vouloir garder tout d'un passé qui s'éloigne et je m'accroche désespérément aux derniers vestiges illusoires.
Aujourd'hui, c'est l'occasion de partager avec vous un souvenir lointain et qui me tient à cœur. une coutume parmi d'autres traditions ancestrales qui ont fini par disparaître.....
" l'aïd au village "
Cette assemblée, une tradition du passé, qui à mes yeux, n'avait que des avantages. On la reconnaît , ses bienfaits. De se revoir, de se regrouper ne serait-ce qu'en l'espace d'un jour, deux jours, voire trois jours.
Il a beau duré mon exile, Il suffit d'un rien pour extraire de mon esprit les souvenirs précieux, et que je suis déjà du côté de mon enfance et mon adolescence, naguère quand on se préparait à cet événement, l'excitation jusqu'à l'âme, suivie d'insomnie onctueuse.
Le jour "J" Taqaravt.
Pendant que les hommes prenaient la direction de Larva, les femmes se donnaient rendez-vous â Taqaravt , vêtues de leurs plus belles robes pour partager des moments de joie, de pardon, de convivialité et de rencontre .
-J'empruntais souvent le petit chemin passant par le lieu- Dit " tighzart". Il faut croire que notre immunité s'était renforcée dans ce lieu improbable, mais pour l'enfant que j'étais, c'était plutôt imaginaire.
C'était les rares moments d'évasion et de liberté pour les jeunes femmes de l'époque. L'occasion, la quintessence d'une société qui lâche un peu de lest.
Dans cette grande place débordante de couleurs, de joie et d'innocence. Remplie d'éclat de rire d'enfants et de refrains de chansons au rythme du bendayer. C'est aussi un moment de retrouvailles, une opportunité de retrouver des personnes perdues de vue.
Tout semblait merveilleux
Le jour suivant, et celui d'après la fête se poursuit. ..Tala , jeddi Moussa, Anner. Voir même le village voisin " welhaj".
Je revois encore les filles toilettėes de belles robes, riant aux éclats sur les sentiers caillouteux, menant à la fontaine " talla" sous les regards discrets et admiratifs. Épris déjà avant la rencontre, avant le sourire qui augurait pour les temps à venir et qui passeront aux convenances d'usage.
Les pas s'accélèrent, dans l'excitation , direction tala.
"Ah! La fontaine, elle habite le cœur de chaque kabyle et qui a inspiré tant de poètes et d'écrivains.
Pour cette raison, une parenthèse, pour lui rendre hommage, car, il n'existe pas un villageois(e) kabyle qui est vécu l'ère des fontaines et qui n'en ait pas la mémoire pleine de suaves souvenirs.
Tala était tout un symbole qui codifiait un vivre ensemble harmonieux.
Aujourd'hui les portes sont fermées, le monde est clos, les fontaines en ruines et désertées, les villages hantés et tristes!"
Le coup d'envoi à été donné, sur place une ambiance exceptionnelle et qui retentissait également de l'autre côté du village " vucikar" on chante on danse sous les regards
Émerveillés des personnes autours sur la dalle les pierrailles les arbres le grand rocher , Les femmes chantaient les légendes les actes de bravoure l'amour l'exil les événements de la vie ....Difficile de trouver une place au milieu de cette foule mais peut importe, dès fois l'essentiel était ailleurs! De l'autre côté des groupes se formaient par ci et par là, on s'y rassemblait par âges, par affinités , on y apprenait des nouvelles, on y échangeait des potins et surtout on liait des amitiés.
Les cœurs en fête, c'était un temps de bonheur.
Puis peu à peu, dans la joie et la bonne humeur que la foule se dissipe et déjà dans l'esprit une hâte pour la prochaine rencontre.
J'aimerais revoir tous ces endroits propices. Refaire les parcours de cœur. Mes jeunes années se sont passées là, dans l'insouciance et le bonheur.
De Taqaravt à tala, de Anner à jeddi Musa, C'était ainsi l'aïd autrefois.
A suivre......
Linda Mahroug.